Définition
La grossesse extra-utérine (GEU) ou grossesse ectopique est une grossesse qui se développe en dehors l’utérus. La très grande majorité des grossesses extra-utérines sont des grossesses dans les trompes utérines de Fallope. On parle alors de grossesses tubaires.
La fréquence des GEU a doublé au cours des 15 dernières années. La grossesse extra-utérine reste rare mais touche quand même 2 % des grossesses soit 14 000 femmes par an, en France selon le Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français.
Elle peut être dans certains cas une urgence chirurgicale susceptible de compromettre le pronostic vital de la femme ou sa fertilité ultérieure.
Les différentes localisations de la grossesse extra-utérine
Normalement, la fécondation se fait dans la trompe de Fallope, ensuite l’embryon doit gagner l’utérus pour la nidation. La grossesse débute donc une fois que cette nidation s’est faite.
Dans la grossesse extra-utérine (GEU), la nidation se fait en dehors de l’utérus. L’œuf mal implanté commence à se développer.
La plupart des GEU sont des grossesses tubaires. Les différentes parties anatomiques de la trompe utérine peuvent être concernées : 75 % dans l’ampoule tubaire, 20% dans l’isthme tubaire et 3 % au niveau du pavillon tubaire. Or la trompe, trop petite, ne peut pas recevoir un embryon.
Rarement, dans moins de 1 % des cas, une GEU peut se développer sur un ovaire (GEU ovarienne), au niveau du col de l’utérus (GEU cervicale), au niveau d’une corne de l’utérus (GEU interstitielle ou cornuale), dans la cavité abdominale (GEU abdominale) ou même dans une ancienne cicatrice de césarienne (GEU intra-murale).
Facteurs de risques de grossesse extra-utérine
Le risque de grossesse extra utérine est augmenté par :
- un antécédent d’Infection Sexuellement Transmissible (IST), d’infection génitale (près d’un tiers des GEU sont liées à une bactérie, le Chlamydia Trachomatis)
- une anomalie des trompes (congénitale ou séquelle d’une maladie, salpingite ou endométriose par exemple)
- un antécédents de chirurgie tubaire
- un tabagisme important (35% des GEU)
- une exposition au distilbène
- le port d’un stérilet (DIU)
- les interruptions volontaires de grossesses (IVG) à répétition
- un antécédent de GEU
- un antécédent de césarienne ou de placenta praevia
- une Fécondation In Vitro ou un Transfert d’Embryon (4.5% après FIV)
- l’âge de la femme (0,4 % de risque de faire une GEU à 20 ans et 2 % entre 30 et 40)
Selon les dernières recommandations de 2018 par le Collège National des Gynécologues Obstétriciens Français, la contraception intra-utérine ne constitue pas un facteur de risque de grossesse extra-utérine (GEU). Néanmoins, en cas de grossesse sur dispositif intra-utérin (DIU), il convient en premier lieu d’éliminer une grossesse extra-utérine. Egalement, un antécédent de GEU ne contre-indique pas la pose d’un DIU.
Diagnostic de la grossesse extra-utérine
La grossesse extra-utérine est une urgence chirurgicale dans sa forme rompue (c’est-à-dire lorsque la trompe est rompue à cause du volume de la grossesse). Son diagnostic est de plus en plus précoce permettant d’éviter sa rupture et la mise en jeu du pronostic vital avec un traitement non chirurgical sous certaines conditions strictes.
Les dosages hormonaux, l’échographie et la cœlioscopie permettent une prise en charge rapide de la pathologie.
Typiquement, la femme se plaint de douleurs pelviennes latéralisées, accompagnées parfois de malaises et de métrorragies (saignement génital) brunâtres après une période d’aménorrhée.
Il existe parfois une douleur provoquée à la palpation du ventre, avec une défense sous-ombilicale.
Le taux des β-HCG plasmatiques permet de confirmer la grossesse, quelle que soit sa localisation, s’il est supérieur à 10 UI/l. Il peut être plus bas que ne le voudrait l’âge supposé de la grossesse.
On vous fera contrôler le taux de β-HCG toutes les 48 heures afin de surveiller la cinétique (la vitesse d’évolution). Celle-ci devant doubler à peu près toutes les 48h pour une grossesse de localisation normale.
A l’échographie, on visualise une masse hétérogène latéro-utérine, constitué par le sac gestationnel en dehors de la cavité utérine et parfois un épanchement au niveau du cul-de sac de Douglas.
Des β-HCG supérieurs à 4000 UI/l sans visualisation du sac gestationnel intra-utérin confirment pratiquement la grossesse extra-utérine.
L’échographie endovaginale permet de mieux visualiser trompes, les ovaires et le contenu utérin et d’avoir une précision diagnostique plus importante.
Dans certains cas, on peut vous proposer une cœlioscopie qui permettra de faire le diagnostic de certitude. Elle visualise une dilatation olivaire bleutée de la trompe, correspondant à un hématosalpinx (saignement dans la trompe) et permet de mettre en évidence l’hémopéritoine. Elle précise le siège de la grossesse.
Quelles sont les complications d’une grossesse extra-utérine
Le risque majeur c’est que l’évolution de l’œuf entraîne la rupture de la trompe et une hémorragie importante. Cette hémorragie massive peut engager le pronostic vital de la femme. Sachez que des douleurs violentes n’accompagnent pas toujours cette hémorragie. Il peut s’agir de douleurs sourdes, accompagnées d’une hémorragie « lente ».
C’est pourquoi, en cas de retard de règles et de douleurs dans le bas du ventre accompagnées de saignements, il faut penser à la grossesse extra-utérine et consulter immédiatement aux urgences gynécologiques.
Le risque tardif est celui d’une infertilité ultérieure.
Traitement de la grossesse extra-utérine
Dans le cas d’une grossesse extra-utérine compliquée, le premier but est de sauver la vie de la patiente, car il s’agit d’une urgence vitale. Et ensuite de préserver les chances d’une grossesse ultérieure en s’efforçant d’être le plus conservateur possible.
Dans ce cas, l’hospitalisation avec surveillance clinique et biologique est indispensable.
Dans tous les cas, il ne faut pas oublier la prévention de l’iso-immunisation Rhésus pour les patientes dont le groupe sanguin est de Rhésus négatif, ainsi qu’une éventuelle prise en charge psychologique.
Le traitement médical est l’utilisation du Méthotrexate par injection intra musculaire.
L’administration de doses répétées peut augmenter l’efficacité du traitement, ce qui laisse la possibilité d’une deuxième injection intramusculaire si la première était inefficace.
L’abstention thérapeutique peut être proposée en cas de grossesse extra-utérine à taux de β-HCG très bas. La surveillance est stricte et nécessite une observance de la part de la patiente par prélèvement sanguin régulier jusqu’à négativation totale du taux de β-HCG.
- Le traitement médicamenteux est aussi efficace que la chirurgie dans les formes non compliquées si :
- le taux de β-HCG est peu élevé (<5000 UI/ml) ;
- la patiente est non ou peu douloureuse ;
- l’abdomen est souple et l’hémodynamique normale ;
- la masse annexielle est inférieure à 5 cm de diamètre.
2. Le traitement chirurgical peut être :
- radical : salpingectomie totale avec résection de la portion isthmique et annexectomie en cas de lésion ovarienne ;
- conservateur avec césarienne tubaire et ablation du sac gestationnel après salpingotomie ;
- cœlioscopique avec salpingectomie ou salpingotomie et aspiration du trophoblaste.
Dans les formes simples, l’intervention est réalisée par coelioscopie, ce qui permet des suites plus simples mais dans toute chirurgie, le risque de laparoconversion est possible.
3. Indications du traitement chirurgical
Elles dépendent de l’état hémodynamique, des antécédents, du désir de grossesse et de l’état de la trompe controlatérale.
Le traitement sera plus facilement chirurgical si :
- la patiente est instable hémodynamiquement ;
- la patiente est très douloureuse ;
- l’échographie montre une masse annexielle de plus de 5 cm, un épanchement intra péritonéal important ;
- il y a un antécédent de grossesse extra utérine homolatérale ;
- en cas de contre-indication au traitement par le Méthotrexate.
Impact sur les grossesses suivantes
Il vous est conseillé d’attendre une période d’au minimum trois mois après le traitement par Méthotrexate pour envisager une grossesse ultérieure, du fait de la tératogénicité (toxicité pour l’embryon) du produit et pour éviter une récidive de grossesse extra-utérine, liée à la trompe mal cicatrisée.
En cas de précédent, la grossesse suivante « à risque » sera très surveillée dans les premiers temps de la grossesse.
Il n’existe pas de précautions particulières à prendre pour éviter une grossesse extra-utérine. Il s’agit d’un accident imprévisible. Vous pouvez néanmoins éviter les facteurs de risques (tabac).
Rassurez-vous, que vous ayez été traitée chirurgicalement ou par Méthotrexate, même si une trompe a dû vous être retirée, vous pourrez sans aucun doute retomber enceinte et mener une grossesse à terme.
Dans la plupart des cas (60% selon le Collège National des Gynécologues-Obstétriciens 1), les femmes ayant souffert d’une grossesse extra-utérine sont enceintes de nouveau dans les deux années suivantes.
Dans les rares cas où les deux trompes seraient retirées, à la suite de plusieurs GEU, vous serez dirigé vers la procréation médicale assistée (PMA).
Quelques témoignages de patientes ayant eu une grossesse extra-utérine
Sophie – 27 ans
« Je suis tombée enceinte très rapidement après mon désir de grossesse.
Après quelques jours de retard, j’ai fait un test de grossesse qui était positif. Avec mon conjoint, nous étions heureux que cela marche si vite. Je suis donc allée faire ma prise de sang qui était bonne et correspondait à mon retard. Quelques semaines après, je commençais à avoir des pertes de sang marrons en petite quantité mais sans aucune douleur. La première fois, ça ne m’a pas inquiétée puis la deuxième fois je suis allée consulter aux urgences gynécologiques. Et là le médecin me dit qu’il faut recontrôler la prise de sang de grossesse pour voir si le taux évolue bien mais que c’est probablement trop tôt pour affirmer quoi que ce soit.
Mon taux était bon mais n’avait pas assez évolué par rapport à l’ancienne prise de sang. Il m’a donc dit de revenir dans 48 heures, pour recontrôler à l’échographie.
Quand je me suis de nouveau présentée aux urgences, là c’était le coup de massue. Il me dit “Votre taux évolue bien mais pas assez” et à l’échographie on voyait un sac mais pas dans l’utérus, j’étais alors à 6 SA.
J’ai donc dû revenir 48 heures après pour recontrôler et c’est là qu’on m’a proposé le traitement par piqûre pour enlever la grossesse.
Je savais que les fausses couches existaient mais je n’avais jamais entendu parler de grossesse extra-utérine… Et pourtant, je ne fumais pas et tout allait
bien selon mon gynécologue.
J’ai attendu 6 mois pour envisager une nouvelle grossesse parce que je n’étais pas prête psychologiquement. Et au bout de 2 mois, je suis tombée une nouvelle fois enceinte et jusqu’à ce qu’on me dise que la grossesse était au bon endroit à 4SA je n’arrivais pas à me réjouir. Aujourd’hui ma fille a un an ».
Madeline – 31 ans
« Je n’étais pas en désir de grossesse, j’avais même un stérilet. Je savais que certaines femmes tombaient enceinte malgré le stérilet. Mes cycles étaient bien réguliers jusqu’au jour où j’ai eu des pertes marrons à la place de mes règles avec des douleurs dans le bas ventre. Je me suis dis que c’était probablement mon stérilet qui s’était déplacé. J’ai donc consulté ma sage-femme qui m’a dit que le stérilet était en place et m’a prescrit une prise de sang de grossesse. Ma prise de sang était revenue positive et j’étais enceinte de 1 mois.
Donc j’ai repris rendez-vous et à l’échographie, la sage-femme m’a dit qu’il n’y avait rien dans mon utérus et que je faisais probablement une GEU. Elle m’a donc dit d’aller aux urgences et c’est là qu’ils ont confirmé la GEU. J’ai donc dû me faire enlever le stérilet et faire une injection pour arrêter la grossesse qui évoluait dans ma trompe droite.
Après cela, on m’a prescrit une pilule. On m’a dit d’éviter le stérilet et que le risque de refaire une GEU était un peu plus élevé dans mon cas mais que ça n’empêcherait pas une grossesse dans l’avenir.
Un an après, je suis retombée enceinte. J’ai consulté tout de suite aux urgences pour voir si la grossesse était bien placée, mais c’était trop tôt. La seule chose qu’on m’a proposé c’est de contrôler mon taux d’hormones de grossesse pour voir s’il doublait bien jusqu’à ce que j’arrive à 1500ui. Une semaine après j’ai reconsulté et c’était encore une GEU et sur la même trompe. Mon taux de BHC%G étant bas, on m’a reproposé une injection de Méthotrexate… que j’ai faite 48 heures après. Bien sûr, on m’a dit que le produit pouvait être nocif si je retombais enceinte de suite et qu’il fallait attendre entre 3 à 6 mois pour envisager une nouvelle grossesse.
J’ai attendu 2 mois et j’ai repris les essais et heureusement je suis rapidement tombé enceinte le 3ème mois après l’injection. Je n’avais pas vraiment respecté les délais alors j’avais un peu peur que ça recommence ou que mon bébé soit malformé mais ma sage-femme m’a rassuré et mon bébé à 2 ans aujourd’hui et se porte très bien ! »
Soraya – 32 ans
« J’ai déjà un enfant, j’en voulais un deuxième. J’ai donc arrêté ma pilule. Mais j’avais des cycles très irréguliers après l’arrêt. Je faisais des tests de grossesse mais ils étaient tous négatifs, donc j’ai arrêté d’en faire. Mon gynécologue m’a dit que mes cycles allaient se régulariser dans le temps.
Deux mois après, je fais un test de grossesse et à ma grande surprise il est positif. Je fais donc une prise de sang et le taux était très haut donc je me dis que c’est parfait. Le lendemain, je commence à avoir des douleurs dans les ovaires avec des petites traces de sang. Je vais donc consulter et le gynécologue me dit que je suis enceinte, qu’il y a bien un embryon avec le cœur qui bat mais qu’il ne grandit pas au bon endroit. Je ne comprenais rien. Il me disait qu’il fallait arrêter la grossesse en urgence sinon je risquais de perdre ma vie. Je lui ai même demandé si on ne pouvait pas déplacer la grossesse au bon endroit…
Je suis donc allée aux urgences, où ils m’ont hospitalisée d’urgence et m’ont fait plusieurs prises de sang. Le soir même j’étais opérée et on m’a dit que ma trompe était à deux doigts de se rompre et que j’avais évité une hémorragie importante. On m’a donc enlevé la trompe et la grossesse. Je suis sortie le lendemain avec des contrôles de prises de sang à faire.
Il ne me reste qu’une seule trompe mais le chirurgien m’a dit que ça n’empêchait pas de retomber enceinte et que les chances étaient les mêmes que si j’avais les deux trompes…
J’ai quand même attendu quelques mois, et par la grâce de Dieu, je suis tombée enceinte au premier mois d’essai et mon bébé est bien placé et il va bien. »