De plus en plus de femmes souhaitent trouver des alternatives non médicamenteuses pour soulager les maux dont elles souffrent, soucieuses de la santé de leur futur enfant. Même si les médicaments autorisés ont fait la preuve de leur innocuité, cette alternative nous semble néanmoins intéressante. Pour cette raison, nous avons souhaité laisser la tribune à Eva Bonandrini, herbaliste et éducatrice à l’environnement qui a créé “Savoir en herbe” en 2017 afin de proposer des ateliers, formations et animations autour de la santé et de l’environnement.
Quelles alternatives et pourquoi
Durant la grossesse il est particulièrement intéressant de trouver des alternatives aux médicaments, qui peuvent avoir des répercussions néfastes sur le développement du fœtus. Par exemple, une étude israélienne récente fait le lien entre la prise de Paracétamol durant la grossesse et un risque plus élevé pour l’enfant à naitre de présenter des troubles du spectre de l’autisme (TSA) ou des troubles de l’attention avec hyperactivité (TDAH).
C’est donc le moment idéal pour se tourner vers l’homéopathie, l’acupuncture et bien sûr la phytothérapie. La phytothérapie est le fait de se soigner par les plantes et remonte à l’origine de l’humanité. Mais plantes et naturel ne signifient pas pour autant qu’il n’y a pas de risques à les utiliser ! Des principes actifs très différents peuvent se retrouver selon les plantes, ce qui leur confère leurs nombreuses propriétés. Il convient donc de ne pas pratiquer d’automédication sans les conseils d’un herboriste ou d’un professionnel médical compétent. Afin d’acquérir un minimum d’autonomie, nous allons voir dans cet article un ensemble de plantes à utiliser sans danger durant la grossesse, ainsi que quelques plantes communes à éviter à doses thérapeutiques.
Il ne s’agit absolument pas d’une liste exhaustive, mais seulement d’une mise en garde concernant les plantes que vous pouvez le plus facilement rencontrer dans votre jardin ou en magasin bio. En cas de doute, s’abstenir !
Il est conseillé de limiter au maximum l’utilisation de toute forme de médication, même la phytothérapie durant les 3 premiers mois de grossesse, période critique durant laquelle tous les organes du fœtus se forment. En effet la métabolisation des plantes absorbées peut être perturbée par les nombreux changements physiologiques qui apparaissent durant la grossesse.
Quelques plantes communes déconseillées pendant la grossesse
L’utilisation de certaines de ces plantes pour un usage alimentaire et ponctuel (sauge, thym, basilic, estragon etc.) ne pose pas de problèmes, le danger se situe à doses thérapeutiques et sur un usage prolongé.
- La sauge officinale, Salvia officinalis (feuilles), l’Achillée millefeuille, Achillea millefolium (sommités fleuries), le Soja, Glycine max (graines), le Houblon, Humulus lupulus (cônes femelles), la Réglisse, Glycyrrhiza glabra (racines) car elles contiennent des phytohormones, c’est-à-dire des substances élaborées par le végétal qui ont des actions similaires à celles de nos hormones. Pour ces plantes on dira qu’elles sont oestrogéno-mimétiques, car elles contiennent des composés proches des œstrogènes.
- Le Fenouil, Foeniculum vulgare (graines), l’Anis vert, Pimpinella anisum (graines) seront à réserver au post-partum afin de favoriser la montée de lait, on dit qu’elles sont galactogènes.
- La Bourse à pasteur, Capsella bursa-pastoris (plante entière fleurie) serait susceptible de provoquer des contractions et donc une fausse couche car elle contient des substances similaires à l’ocytocine.
- Le Basilic, Ocimum basilicum (feuilles) et l’Estragon, Artemisia dracunculus (feuilles) favorisent le déclenchement des règles, elles sont dites emménagogues et seront donc susceptibles de provoquer une fausse couche à haute dose.
- La Rhubarbe, Rheum palmatum (racines) et la Bourdaine, Frangula dodonei (écorce) sont des laxatives très délicates à utiliser, elles contiennent des anthraquinones qui vont diminuer la réabsorption d’eau et d’électrolytes au niveau de la paroi intestinale.
Les formes d’utilisation des plantes
Rappelons que les plantes peuvent s’utiliser sous différentes formes galéniques dont les principales sont : sirop, teinture ou alcoolature (macération des plantes fraiches ou sèches dans de l’alcool), macérât hydro-glycériné (macération ,principalement des bourgeons, dans de l’eau , de l’alcool et de la glycérine), macérât huileux (macération dans de l’huile végétale), tisanes (macération des plantes sèches dans de l’eau), poudre encapsulée dans des gélules, huile essentielle (distillation à la vapeur d’eau de plantes aromatiques) et hydrolat (résidu aqueux de la distillation à la vapeur d’eau des huiles essentielles).
Les huiles essentielles seront abordées dans un autre article.
Il est évident que durant la grossesse on se tournera principalement vers les tisanes et poudres pour un usage interne et les macérâts huileux pour un usage externe. Les sirops peuvent être d’une aide ponctuelle précieuse notamment pour les problèmes ORL mais attention car ils contiennent beaucoup de sucre. Les préparations à base d’alcool sont déconseillées ou sur avis d’un professionnel.
Il convient de se tourner vers des plantes ou produits transformés issus de l’agriculture biologique, afin d’éviter que des substances indésirables comme des résidus de pesticides ou des additifs toxiques soient présents. Pour cela il existe des labels tels que Nature et Progrès, le label AB européen ou encore le label SIMPLES pour les plantes sèches.
Il existe 3 sortes de tisanes :
- L’infusion : on verse de l’eau frémissante (pour les fleurs) ou bouillante (pour les feuilles) sur les plantes sèches, puis on couvre et on laisse infuser 3 à 5 mn (fleurs) ou 10 à 15mn (feuilles ou mélange des deux). Ensuite on filtre. Les puristes préfèrent mettre les plantes sèches directement dans une casserole avec l’eau froide et porter à ébullition doucement, puis stopper le feu et laisser infuser à couvert de la même manière que ci-dessus.
- La décoction : concerne les parties coriaces des plantes (graines, écorces, racines…). La plante est mise directement dans l’eau froide dans la casserole jusqu’à ébullition, puis l’ébullition est poursuivie quelques minutes et enfin on laisse infuser de la même manière que pour l’infusion ci-dessus.
- La macération à froid : s’utilise pour certaines plantes dont les principes actifs peuvent être détruit avec la chaleur et pour certaines contenant des mucilages (polysaccharides qui gonflent au contact de l’eau) comme la Guimauve, Althaea officinalis (racines). On laisse tremper la plante toute une nuit dans de l’eau froide, puis on filtre et on boit froid ou on réchauffe très doucement le liquide.
Les plantes utilisables pour les petits maux de la grossesse
En cas de grossesse pathologique, tournez vous bien entendu vers votre sage femme ou médecin.Lorsque la forme galénique n’est pas précisée, les plantes citées seront à utiliser sous forme de tisanes.
- Anémie et fatigue
L’ortie, Urtica dioica (feuilles) est reminéralisante et contient outre du fer, de nombreux oligo-éléments essentiels tels le calcium, magnésium, potassium ainsi que des vitamines (C, B9…). Elle peut s’utiliser en prévention avant la conception ou régulièrement au long de la grossesse, sous forme de tisanes ou de poudres. Egalement le framboisier à partir du 7ème mois de grossesse (voir 4/ La plante de la grossesse).
- Constipation
La Mauve, Malva sylvestris (fleurs), la Guimauve, Althaea officinalis (racines) ou le Psyllium blond Plantago ovata (graines ou téguments de la graine), des laxatives de lest grâce aux mucilages qui font gonfler le bol alimentaire au contact de l’eau dans les intestins et augmentent ainsi mécaniquement le péristaltisme intestinal. Le Psyllium blond s’utilise à raison de deux cuillères à café à laisser tremper dans un verre d’eau froide quelques minutes, puis la totalité doit être bu suivit d’un grand verre d’eau. Préférentiellement au coucher et/ou au lever. La Guimauve s’utilise en macération à froid. Egalement le classique jus de pruneaux ou une cuillère à soupe d’huile d’olive ou d’amande douce le matin à jeun (si vous y arrivez !).
- Dépassement du terme
En prévention, voir le framboisier ci-dessous et l’acupuncture, deux séances à réaliser au début du dernier mois avec une sage femme ou un acupuncteur formé à l’acupuncture obstétricale
- Hémorroïdes
Eau florale ou infusion d’Hamamélis, Hamamelis virginiana (feuilles) qui est astringente et va donc resserrer les tissus enflammés et gel d’Aloe vera à appliquer localement. En interne on utilise le Cassissier, Ribes nigrum (feuilles) pour tous les problèmes circulatoires durant la grossesse, peut se prendre au long court (toujours observer une pause d’une semaine toutes les 3 semaines).
- Infection urinaire
La Bruyère officinale, Calluna vulgaris (fleurs) pour ses propriétés antiseptiques urinaires, pourra se prendre sur une période courte. En prévention, pensez à boire beaucoup d’eau additionnée de jus de citron tout au long de la grossesse.
- Insomnie
Le soir infusion des plantes suivantes seules ou associées : Passiflore, Passiflora incarnata (partie aérienne), Mélisse, Melissa officinalis (feuilles), Aubépine, Crataegus monogyna (fleurs et feuilles) et les sédatives plus légères : Lavande, Lavandula angustifolia (fleurs), Oranger, Citrus aurantium(feuilles), Tilleul, Tilia cordata (fleurs et bractées). A associer à un massage de la voute plantaire ou vaporisation de l’oreiller avec un hydrolat de fleurs d’oranger ou de lavande.
- Jambes lourdes et varices
En interne en prévention le Cassissier, Ribes nigrum (feuilles) et en local de l’eau florale d’Hamamélis, Hamamelis virginiana.
- Nausées
De manière ponctuelle : Le gingembre, Zingiber officinale (rhizome) sous forme fraiche, ½ phalange râpée dans une infusion avec un peu de miel, ou bien sous forme de poudre en gélules, mais attention à respecter les doses indiquées par le fabriquant. En effet, il présenterait des propriétés utéro-toniques à haute dose.
- Œdème
Le Pissenlit, Taraxacum officinale (feuilles) est un draineur hépato-rénal fantastique à prendre en cure de 10 jours renouvelable, en prévention vers le dernier trimestre de grossesse.
- Reflux gastro-oesophagiens
La Guimauve, Althaea officinalis (racines) émolliente associée à la Mélisse, Melissa officinalis(feuilles) qui va agir au niveau du système nerveux autonome afin de réguler les spasmes de l’estomac et la Camomille allemande, Matricaria recutita (fleurs) pour ses capacités anti-inflammatoires. Le jus de pommes de terre peut aussi être un bon complément afin de soulager les douleurs, pour celles qui osent !
- Rhume, maux de gorge
Le Thym, Thymus vulgaris (feuilles) un puissant anti-infectieux, à prendre 2 fois par jour sur une période courte (quelques jours à une semaine). En cas de toux sèches ou de maux de gorges, associer à une plante émolliente telle que la Mauve, Malva sylvestris (fleurs) et au miel aux propriétés antibactériennes et cicatrisantes. Le sirop de Plantain, Plantago Major pourra également être une option intéressante.
- Vergetures
En massage sur le ventre, la poitrine, le haut des cuisses et le bas du dos dès le début de la grossesse, des huiles végétales riches en oméga 3 ,6 et 9, par exemple : Bourrache et onagre (à garder au frigo), sésame, amande douce, rose musquée, macadamia.
La plante de la grossesse
Le framboisier, Rubus idaeus (feuilles) a été utilisé historiquement par les sages femmes du monde entier et son usage perdure aujourd’hui, même si nous ne connaissons pas encore exactement ses mécanismes d’actions. Plusieurs études récentes semblent attribuer ses propriétés à un composé nommé fragine qui agirait précisément sur la couche musculaire de l’utérus, mais l’action globale de la plante et son adaptabilité à chaque femme n’est pas encore élucidée. Evitant à la fois les accouchements prématurés et le dépassement du terme, cette plante intelligente s’adapte aux besoins de l’organisme et peut être utéro-tonique ou relaxante !
Elle permet des contractions plus efficaces et plus régulières lors de l’accouchement et diminuerait donc le temps de travail. Elle permet de limiter les pertes de sang et aiderait à l’expulsion du placenta. Riches en fer et autre oligo-éléments, elle est toute indiquée pour prévenir l’anémie et autres carences possibles. Elle favorisera également la montée de lait après l’accouchement. Sachant qu’il n’existe pas de consensus entre les différents herboristes et pays, on préconisera d’attendre le 7ème mois en faisant preuve d’une prudence peut être excessive. On démarrera par une à deux tasses par jour puis on passera à 3 tasses par jour le dernier mois.
N’hésitez pas à associer les plantes entre elles pour obtenir des synergies efficaces pour contrer plusieurs maux à la fois, car généralement ils n’arrivent jamais seuls ! A retenir, les plantes sans danger sur des cures de 3 semaines ou plus : Mélisse, Ortie, Cassis, Lavande, Oranger, Tilleul, Mauve, Guimauve, framboisier (à partir du 7ème mois). Pour commander des plantes sèches en vrac ou des produits transformés de qualité, faites un tour sur l’annuaire des herboristeries en ligne du site Althea Provence.